lundi 21 mars 2011

La tolérance

Il y a une nouvelle émission à la télévision à 19 h que je juge vraiment inappropriée pour cette heure de diffusion. Les enfants ne sont pas encore au lit, et chaque fois qu’on tombe sur ce poste, je dois m’empresser de trouver autre chose, car pendant les 5 secondes où on tombe sur cette émission, on entend soit le mot sexe, drogue (et rock’n roll !!!!), suicide ou autre sujet que je n’ai pas nécessairement le goût d’aborder avec les enfants juste avant de les mettre au lit.

Justement, la semaine dernière, je zappais, les enfants assis près de moi. Arrivée sur cette chaîne, le temps que je constate que c’était encore cette foutue émission, on a eu le temps de voir une pimbèche s’approcher d’un gars assez loser et lui dire, d'un ton hautain et dégradant : il paraît que tu es gay.

Je change de poste aussitôt.

Petit Monsieur : Maman, pourquoi tu changes de poste vite comme ça, ne t’en fais pas, gai ça veut dire joyeux !
Fillette : Euh, non, pas toujours.
Petit Monsieur : Ah non ?
Fillette : Ça peut vouloir dire un homme qui aime un autre homme.
Petit Monsieur : …
Maman pieuvre : …
Petit Monsieur : Ah, comme lesbienne, mais pour hommes ?
Maman pieuvre, souriant : Oui, c’est ça.
Petit Monsieur : Ouache !!
Fillette : C’est rare ça, hein maman ?

On peut toujours compter sur Fillette pour amorcer LA discussion qu’on a TELLEMENT pas le goût d’avoir.

Maman pieuvre : Euh, non. Y’en a plein des gays.
Fillette, étonnée : Hein ????? Mais, ils ont l’air de quoi ???
Maman pieuvre, riant : Ben, de nous. Ils sont comme nous, il n’y a rien qui les distingue vraiment de nous.
Fillette, n’en revenant pas : Ça veut dire que j’en ai peut-être déjà vus ???
Maman pieuvre, omettant de lui dire qu’il y en a même dans sa propre famille : Ben oui !

Silence.

Fillette : Est-ce que c’est une maladie ?

Ok, on a du chemin à faire.

Maman pieuvre : Ben non.
Fillette : Mais pourquoi ils sont comme ça ?
Maman pieuvre, ne sachant pas trop comment expliquer ça : Ben ils sont comme ça dans leur cœur. Eux, ils sont attirés par des gens du même sexe qu’eux. Ils sont nés comme ça. L’important, c’est d’aimer quelqu’un et d’être aimé, peu importe si c’est un homme ou une femme, il faut être bien dans sa peau, et les gays, ils sont bien dans leur peau en aimant quelqu’un du même sexe qu’eux.

Fillette était songeuse.

Je vous le garantis, cette conversation n’est pas finie.

jeudi 17 mars 2011

Grandir (suite)

Le soir venu, Fillette était d'une humeur massacrante. Rien ne faisait son bonheur, elle disait qu'elle avait eu la pire journée, etc.

Petit Monsieur vient me voir à la première occasion, comme s'il avait pensé à ça toute la journée.

Petit Monsieur : Maman, est-ce qu'on parle à Fillette? Tu as oublié?

Maman pieuvre : Non, je n'ai pas oublié, mais ce n'est peut-être pas le moment idéal, elle n'est pas trop de bonne humeur...

Petit Monsieur : Ah.

Quelques moments plus tard, Fillette revient dans la cuisine et commence à me raconter ce qui s'est passé à l'école et qui la dérangeait tant. Je l'écoute, lui donne quelques conseils, fais quelques blagues. Elle rit. Elle retrouve sa bonne humeur.

Maman pieuvre à Fillette : Tu vois! Tu vas mieux maintenant que tu en as parlé. C'est pour ça (répétai-je pour la enième fois) que c'est important de le dire quand ça ne va pas!
Fillette, reluctante : Ouin...

Maman pieuvre, toussotant : Justement, Petit Monsieur voudrait te parler de quelque chose. Est-ce qu'il peut?
Fillette, surprise : Oui...

Petit Monsieur s'installe, se tordant les mains : Ben c'est juste que je trouve que depuis quelque temps, on dirait que tu n'es plus gentille avec moi. Des fois je dis des choses et tu réponds toujours on s'en fout...

Fillette hausse les sourcils.

Petit Monsieur, les larmes commençant à monter dans ses yeux, mais s'efforçant que ça ne paraisse pas : Quand tu dis ça, je pense que tu te fous de moi... et ça me fait de la peine...

(Chapeau Petit Monsieur! J'étais tellement fière.)

Il avale, inspire et est pendu aux lèvres de sa soeur. Je peux voir tout l'espoir dans ses yeux, mêlé à la crainte d'être rejeté comme une vieille chaussette...

Fillette, étonnée : Ah oui? Je m'excuse (wow!!! venant d'elle, c'est précieux!!!) Je me fous pas de toi du tout, je me foutais de bien écrire à l'ordi (je me retiens d'y aller de mon discours sur l'orthographe).
Maman pieuvre : Donc tu aimes encore ça faire des choses avec ton frère?
Fillette : Ben oui!
Maman pieuvre : Et tu te fous pas de lui ou de ce qu'il dit?
Fillette : Ben non. J'avoue que des fois, il fait des gaffes, mais c'est pas grave.

(Mais où est donc passée ma fille? Et qui est cette personne aussi conciliante???)

Et là, je vous assure, j'ai vu de mes propres yeux un énorme poids quitter les épaules de mon fils. Il s'est redressé, a souri. C'était beau à voir.

Petit Monsieur : Ok!

C'était réglé.

Un peu plus tard :

Maman pieuvre : Es-tu fier de toi?
Petit Monsieur : Pourquoi?
Maman pieuvre : D'avoir parlé à ta soeur de ce qui n'allait pas?
Petit Monsieur : Oui.
Maman pieuvre : Es-tu soulagé? Est-ce que ça va mieux?
Petit Monsieur : Oui.

Et je n'ai pu m'empêcher de lui faire un peu la morale, tout à coup une petite fraction de ce que je lui dis réussissait à se frayer un chemin dans son inconscient.

Maman pieuvre : Tu sais, tu dois te rappeler que tu peux TOUJOURS parler à quelqu'un. Ce n'est pas obligé d'être moi. Ça peut être ton père, ta soeur, ton prof, tes grands-parents, un autre adulte, des amis. Tu peux TOUJOURS demander de l'aide. Il y a TOUJOURS une solution. À tout. Même si dans ta tête tu ne le penses pas, il y a TOUJOURS une solution.

Petit Monsieur me regardait en silence. Il hoche la tête.

Pour le moment, le message est compris.

lundi 14 mars 2011

Grandir

Petit Monsieur est triste depuis quelque temps. Hier soir, quand il s'est couché, il m'a demandé s'il pouvait me parler.

Je m'étends à côté de lui.

Petit Monsieur : J'ai beaucoup de peine ces temps-ci.
Maman pieuvre : Pourquoi?
Petit Monsieur : On dirait que Fillette n'est plus pareille.
Maman pieuvre : Comment ça?
Petit Monsieur : Ben des fois, elle est pas gentille avec vous ou avec moi, elle dit toujours qu'elle s'en fout. On dirait qu'elle se fout de tout. Et de moi.
Maman pieuvre : Ah. Ben Fillette aura bientôt 11 ans, elle grandit, elle change, elle veut s'affirmer, elle devient une ado...
Petit Monsieur : On est pas ado à 11 ans (euh maintenant oui), pis elle est pas obligée de toujours se chicaner (à qui le dis-tu) et de se foutre de tout (tu l'as dit!!)
Maman pieuvre : Hum, tu as raison, mais ça ne veut pas dire qu'elle ne nous aime plus, elle...
Petit Monsieur : En tous cas moi je ferai pas ça! Je suis bien comme je suis et je ne changerai pas!
Maman pieuvre, riant : Toi aussi tu vas grandir et tu vas changer. Pis peu importe ton comportement, je vais savoir que c'est juste une phase parce que je connais qui tu es vraiment...
Petit Monsieur : Je veux pas que Fillette évolue.

Je me retiens de rire.

Maman pieuvre : Elle est toujours ta soeur, même si elle grandit, elle t'aime beaucoup quand même et ça ne changera pas.
Petit Monsieur, soupirant : C'est compliqué. C'est difficile à t'expliquer, mais je me sens tout petit quand elle me parle comme ça.

Je retiens mon souffle.

Maman pieuvre : Je trouve que tu l'expliques très bien.
Petit Monsieur : Hier, je lui ai juste dit qu'en anglais, ça s'écrivait color et non colur comme elle l'écrivait à l'ordi et elle me répond super bête : On s'en fout!!!!
Maman pieuvre : Ah ben ça c'est parce qu'elle voulait pas que son petit frère de 8 ans soit meilleur en orthographe anglaise qu'elle!!!
Petit Monsieur : À chaque chose que je dis ou que je propose, elle dit on s'en fout. Si elle se fout de moi, moi aussi je vais me foutre d'elle.
Maman pieuvre : Tu vas lui faire quelque chose que tu n'aimes pas qu'elle te fasse? C'est une bonne idée ça?
Petit Monsieur : Ben je sais pas quoi faire!
Maman pieuvre : Parle-lui, dis-lui comment tu te sens quand elle est bête avec toi.
Petit Monsieur : Elle va dire on s'en fout!
Maman pieuvre : Il faut que tu essaies, si ça marche tu seras content! Si ça marche pas, on pensera à autre chose, y'a toujours une solution.
Petit Monsieur : Vas-tu être avec moi?
Maman pieuvre, qui se doute de la réaction de Fillette : Si tu veux...
Petit Monsieur : Mais si tu oublies demain?
Maman pieuvre : J'oublierai pas, c'est important pour toi.
Petit Monsieur : Au moins j'exprime mes émotions et je le dis quand ça va pas!!!!
Maman pieuvre, riant : Oui, et tu fais très bien ça et continue.

Petit Monsieur, qui, depuis toujours, voue une admiration sans bornes à sa grande soeur. Il sent qu'elle se détache de lui peu à peu et a l'impression de la perdre. Elle grandit, et ça le fait grandir aussi. Il ne veut pas que ça change.

La conversation de ce soir promet!!!

lundi 7 mars 2011

Un retour haut en couleurs

C'est fait. Nous sommes (malheureusement) de retour. Une petite semaine, trop courte. Comme toujours. L'an prochain, lors de notre voyage annuel de janvier avec les enfants, nous partirons 11 jours. On a eu notre leçon.

Le tout a débuté avec petit Monsieur qui, la VEILLE de notre départ, a vidé le reste de son bol de céréales dans la toilette et a tiré la chasse... avec la cuillère au fond. Bon. Une salle de bains qui doit être condamnée jusqu'à ce qu'un plombier nous vienne en renfort. Comme je n'avais pas le goût de penser à tout ça juste avant qu'on parte, je n'ai rien fait. Je dois appeler le plombier d'ailleurs. Pas de salle de bain au rez-de-chaussée, c'est assez casse-pieds.

Petit Monsieur et Fillette devaient aller chez ma mère pendant que l'Homme et moi allions à Antigua pour la semaine. Au milieu de la semaine, ma mère devait aller reconduire Petit Monsieur au village des athlètes parce qu'il participait aux Jeux du Québec.

Par quoi commencer?

Le voyage.

On se croyait dans une publicité de Corona. Le sable blanc, la mer turquoise, presque toujours seuls, c'était incroyable. Même si il y a souvent eu des nuages, la beauté de l'île était à couper le souffle. Les plages et la végétation surtout. Parce qu'en ville, c'est pauvre. En décrépitude. Les chiens errants partout, les chevaux, les coqs et les chèvres en liberté, on se demandait comment un endroit aussi beau pouvait être aussi pauvre.

Berlusconi a une villa sur l'île. Est-ce l'antre de partouzes effrénées?? Bref, il y a des endroits où on se demandait vraiment qui habitait dans ces maisons aussi grosses et luxueuses. C'est partout pareil : des coins très riches côtoient des maisonnettes délabrées.

C'est une île anglaise, donc conduite à gauche de la route obligée. Ouf. On a fini par s'habituer, mais l'Homme a passé la semaine à actionner les essuie-glace au lieu des clignotants, car dans la voiture, tout est inversé. Le volant à droite, les clignotants à droite, la boîte de transmission à gauche, etc. On ne s'est pas habitués à ça de la semaine.

Le mercredi, c'était le grand jour de Petit Monsieur. Les propriétaires de notre appartement nous ont gentiment prêté leur ordinateur portable pour qu'on puisse le regarder sur Internet. Ils l'ont même regardé avec nous.

Petit Monsieur plongeait le premier de tous les plongeurs de la compétition!! Quelle pression!!

On l'a regardé exécuter ses 4 figures. Entre vous et moi, il n'était pas à son meilleur hihi... on l'a vu plonger beaucoup mieux que ça. On était très impressionnés parce qu'il y avait un commentateur et un analyste qui décrivaient l'action. Très professionnel comme webcast.

Il était dans la catégorie des 11 ans et moins (il a 8 ans). Il s'est classé 15e sur 23. Pas si mal compte tenu que les plus grands faisaient des doubles périlleux dont les degrés de difficulté étaient largement plus élevés que ses figures à lui. Pour une première compétition provinciale, c'est pas mal. On était bien contents de l'avoir vu de notre île.

Tout a commencé à aller moins bien le jour de notre départ. Notre avion devait quitter Antigua à 17 h. Premièrement, c'est automatique : dès qu'on quitte l'île, toutes les valises sont systématiquement fouillées. Ça nous avait tout pris pour la fermer, elle débordait. Allez, hop, on ouvre le tout, on sort le tout et débrouillez-vous pour refermer le tout.

Vers 16 h, on entend à l'intercom que le vol en provenance de Montréal avait 2 heures de retard. Comme c'est le vol qu'on prenait pour s'en aller, on savait que c'était de mauvais augure. On a pensé qu'il y avait peut-être une tempête.

On entend à travers les branches que ce vol devait passer par la Guadeloupe avant de venir nous chercher. On ne comprenait rien. Toujours est-il que finalement, on embarque dans l'avion vers 19 h 30 et l'équipage nous apprend que les employés au sol ont déclenché une grève spontanée et qu'ils refusent de ravitailler l'avion en carburant. Nous devons donc faire 1 h 45 d'avion vers la République dominicaine (mouvement latéral qui ne nous approche aucunement de notre profit) pour aller faire le plein avant de rentrer à Montréal. Bref, au lieu d'arriver à 21 h 30, nous sommes arrivés à 2 h 30.

À la pluie battante.

Après une courte nuit chez ma mère, on est rentrés à la maison le lendemain et quelle ne fut pas notre surprise de voir qu'il y avait PLUS de neige qu'à notre départ. Ouache.

Sur le répondeur à la maison, des messages d'un journaliste qui voulait une entrevue avec moi à propos de mon fils (!!!!!!). Il était le plus jeune délégué de notre région (sur 185) à aller aux Jeux du Québec. Comme j'étais absente, je n'ai pu parler avec lui. Mais par curiosité, je vais sur Google et j'entre le nom de Petit Monsieur, et plusieurs entrées pertinentes s'affichent (c'est fou quand son fils de 8 ans peut être « googlé »!!!).

Il y avait un article complet sur lui dans le journal avec une photo de son joli minois. Le journaliste lui avait posé des questions et avait rencontré son entaîneure. J'étais assez énervée merci!! Il a même été comparé à Alexandre Despatie (médaillé olympique et triple champion du monde).

Wow!!!!!

Ça finissait bien notre semaine!

Maman pieuvre à Petit Monsieur : Tu as donné une entrevue à un journaliste?
Petit Monsieur : Non...
Maman pieuvre : Ben le Monsieur t'a posé des questions et il a écrit un article sur toi!
Petit Monsieur : Ah oui, y'a quelqu'un qui m'a parlé, mais je savais pas c'était qui...

Au moins il se prend pas au sérieux!!